DE BRUG'HIER

DE BRUG'HIER...

Merci à Jean-Marie Pistre, auteur Bruguiérois, pour cette belle présentation.

Bruguières

ce nom vient de l’environnement, las brugues ou bruyères, (ce qui sera d’ailleurs le nom du village à la Révolution), à l’image des patronymes des villes voisines comme Lespinasse (épines), Castelginest (genêts) ou Fenouillet (fenouil). De nombreux bois recouvraient les coteaux et même les bords de l’Hers.

Au moyen-âge, l’habitat constitué de quelques fermes isolées devait être dispersé entre le haut de la côte et la plaine. Une église dédiée à Saint-Martin est attestée en 1080. (En ces temps, les églises n’étaient pas forcément proches des habitations). Après avoir été dépendante de l'Abbaye de Moissac, cette église passa sous le contrôle de l'Abbaye de Saint-Sernin de Toulouse. C’est d’ailleurs dans le Cartulaire de l’abbaye de Saint-Sernin que se trouvent la plupart des mentions de Bruguières au moyen-âge

La fondation en 1114 d’une abbaye de femmes, à Lespinasse va se faire ressentir ici. Ainsi en témoigne le nom de Gamouna (gué des moines), sur le chemin de Bruguières à Lespinasse, avant la création du pont sur l’Hers attesté au XVIème siècle.

 

Puis lors de la guerre de cent ans, en 1382, pour se protéger des exactions des bandes armées du Prince Noir ou d’autres soldats qui sévissaient dans la région, les habitants demandent la permission, comme ceux de la plupart des villages proches, de bâtir un fort autour de l’église pour s’y réfugier. Celui-ci, contrairement aux autres, bâtis en terre, était édifié en briques, sans doute de 8 à 10 m de hauteur, avec fossé en eau. Il a été entretenu jusqu’en juin 1595 où, devant l’armée du Duc de Ventadour, on a ouvert les portes contrairement à celui de Fenouillet où devant la résistance, la garnison a été tuée. La porte d’entrée du fort se trouvant proche de l’actuelle entrée de l’église. Plusieurs maisons du ce quartier sont d’origine médiévale. Mais la population y étant à l’étroit, on a créé, suivant un plan très ordonné le village, tout autour d’une vaste place rectangulaire, avec le four à pain, la forge et des maisons de largeur identiques, probablement au XVème siècle.

La population à cette époque-là, est composée de paysans et approche la centaine d'âmes.

La terre est aux mains de riches familles toulousaines, magistrats ou marchands. Du XIVème au XVIème siècle, on trouve de nombreux capitouls seigneurs ou co-seigneurs de Bruguières. Les choses sont plus claires à partir de 1560, le seigneur de Saint-Jory, Michel Dufaur rachète la juridiction de Bruguières. Il y aura Charles, Pierre, puis Jacques Dufaur. Ensuite en 1613 ce sera la lignée des « d’Olive » avec rachat de la juridiction par Jean d’Olive. Le plus fameux seigneur, pendant 55 ans, étant Georges d’Olive conseiller du parlement qui, à l’époque de Louis XIV en 1657, a rebâti le château actuel sur la place, comme en témoigne l’inscription au-dessus de la porte principale.

 

A noter une autre famille noble, les « de Buisson » qui avaient un château au Petit Paradis (ou Paravis) situé près de l’autoroute A62 (impasse du petit-paradis). Cet ancien château fort, remanié à la Renaissance a été vendu pour être démoli en 1845. Les « de Buisson » avaient principalement leurs terres sur la rive gauche de l’Hers, alors que les « d’Olive » possédaient principalement les terres rive droite, comme celles de La Barthe (Super U), ainsi que le parc du château (actuel parc de Xeraco). Tous ces châteaux étant alors des « résidences secondaires » des riches toulousains.​​​

C'est en 1511 qu'eut lieu la reconstruction de l'église actuelle sur les ruines de l’édifice érigé au XIème siècle. Son édification fut terminée en 1538. Toutefois la consécration solennelle n'eut lieu que le 20 mai 1550. Mais peu après, en 1562, elle fût incendiée par des Reistres allemands, mercenaires à la solde des protestants de Montauban.

Par ailleurs, le nom de Bruguières est associé à la présence du pèlerinage à Notre-Dame de Grâce.

Malgré des incertitudes historiques, on situe le début de celui-ci au XVème siècle. En effet, la légende dit qu’il aurait existé un oratoire au Nord du village, au point le plus haut, au milieu de l’actuel quartier Notre-Dame (impasse du prieuré). Celui-ci aurait été détruit à l'époque des cathares. La statue de la vierge ayant été cachée en terre pour échapper au vandalisme, elle aurait été découverte par un laboureur dont les bœufs se seraient arrêtés à cet endroit. Après avoir été apportée à l’église, par trois fois la statue était retrouvée le lendemain dans le champ de son « invention » (découverte). 

Ainsi on décida de bâtir une chapelle en ce lieu. Si ce type de découverte miraculeuse n’est pas spécifique à Bruguières, néanmoins, les indices écrits convergent pour la situer vers les années 1450. La statue de la vierge, objet du pèlerinage, conservée dans le petit musée dans l’église est fort ancienne, on peut la dater raisonnablement du XIVème. Elle n’a pas toujours été décorée comme aujourd’hui. Elle était ornée de manteaux offerts en reconnaissance, car elle fût vénérée pour de nombreux miracles.

 

Ceci explique que, devant l’afflux des pèlerins, les habitants ont rebâti en 1602 une grande chapelle de briques, (25x10 m) contrairement au premier édifice érigé en terre (briques crues). Les habitants du lieu administraient eux-mêmes la chapelle en élisant chaque année des marguilliers (laïcs gérant les offrandes) pour cette charge. Puis, suite à querelle avec le recteur (curé) du village, le seigneur de Saint-Jory leur suggéra de faire appel aux pères Dominicains du couvent de Toulouse. En novembre 1605, ceux-ci prirent les choses en main et apportèrent un souffle nouveau au pèlerinage. Dans la lignée du Concile de Trente, ce renouveau de piété populaire constituait une démonstration de la vitalité catholique toulousaine dans un contexte de lutte contre les protestants de Montauban. Un ouvrage de 1644, raconte sur 300 pages l’histoire étonnante de ce lieu et, en particulier, relate avec précision 44 miracles

Ainsi, une nuit de 1557, trois personnes d’une même famille : le père, la mère, et le fils dérobent le manteau de la statue de la vierge. La cloche se met à sonner toute seule, alertant les voisins qui découvrent le vol. Les voleurs seront retrouvés à Grenade en train de monnayer leur butin. Ramenés à Bruguières, jugés, ils furent pendus. Les hommes sur la route de Gafelaze (Saint-Alban) et la femme au pont sur le ruisseau des combes au début de la route de Montauban, en face la rue Notre-Dame et qui porte depuis le nom de pont de la Pendude.

 

En 1786 on réaménage la côte de Bruguières, en coupant tout droit au lieu de serpenter le long du creux, qui est encore nommé aujourd’hui le chemin prigount (profond)

Au XVIIIème, au château, les « d’Olive », famille de magistrats laissent place aux « de Beaufort », des militaires.

Le seigneur Joseph-Michel de Beaufort lieutenant, émigra. Celui-ci ne résidait pas à Bruguières mais à Nancy. Il s’était marié à Paris en 1781. Mais il fut tué à Quiberon en 1793 aux cotés des anglais. Son frère, Victor de Beaufort, prêtre de l’oratoire, caché à Bruguières, fut guillotiné en 1794 suite à dénonciation.

La Révolution fut une période animée à Bruguières. En effet le village était alors chef-lieu de canton et les zélés responsables locaux relayaient la propagande officielle, soit par des cérémonies au Temple de la Raison (église), soit par des animations publiques. Ils nous ont laissé d’extraordinaires comptes-rendus des fêtes décadaires. La participation obligatoire des gens rassemblait sur la place publique les citoyens des alentours pour célébrer les moissons, la nation, la jeunesse, etc.… Il y eût des épisodes fameux, comme en 1793, sur la place, la destruction du mur devant le château, ou des statues de l’église. Ou encore la plantation d’un arbre de la liberté sur la place (en face de l’agence de la Caisse d’Epargne).​​​​​

 

A la fin de l’Ancien Régime, le couvent des dominicains avait perdu de son lustre. Il était en mauvais état. La chapelle Notre-Dame de Grâce vit son dernier pèlerinage en l'an 1793, avant d'être vendue pour 100.000 livres avec le couvent, à un négociant toulousain dénommé Lacan. Qui en fit son habitation. La statue de la vierge, cachée pendant la Révolution par une femme prénommée Ménustre, est le seul témoin de ce lieu sacré, puisque les briques de la chapelle ont toutes été récupérées ! La statue prit place dans l’église paroissiale en 1803 où elle est toujours visible. Quelques années plus tard avec la Restauration, on s’empressera d’élever un grand calvaire à l’emplacement de l’arbre de la liberté !

 

Lors de la bataille de Toulouse du 10 avril 1814, l’armée anglaise de Wellington a bien stationné par chez nous le 8 avril, comme en témoigne le registre de l’état civil qui a enregistré la naissance de Marie-Anne Barlow, fille d’un caporal irlandais de la 4ème division anglaise...

Après la Révolution, au château se sont installés des marchands toulousains, les « Lignières ». Bernard Lignières fut maire de Bruguières de 1808 à 1818.
 

Un autre noble, de Caumels, lui aussi officier, ayant émigré, verra le petit château du castelet, donnant sur la place (actuel local du Crédit Agricole), et ses terres, vendus à Jean-Guillaume Girou, un homme de loi.

Parmi les grands propriétaires, un autre noble, Germain-François de Cucsac, ancien trésorier général de France, a traversé la Révolution sans dommage, contrairement à d’autres de sa famille qui, comme Bernard-François, massacré au couvent des Carmes à Paris en septembre 1792, ou de Germain-Marie de Cucsac qui faisait partie des 6 conseillers du parlement de Toulouse guillotinés à Paris le 20 avril 1794.​​​​​​

Par son testament de 1805, Germain Cucsac lègue ses nombreux biens. Un décret impérial du 3 août 1810 « autorise l’acceptation de l’institution universelle faite par le sieur Cucsac aux pauvres ... pour le soulagement des habitants des trois communes de Bruguières, Saint Sauveur et Castelginest. 1° Une maison de charité et de secours à domicile, qui sera desservie par 3 sœurs de la congrégation de Saint-Vincent de Paul, et où les jeunes filles seront instruites, 2° une école de charité tenue par un ecclésiastique chargé de l’instruction des jeunes garçons ».

 

Son domaine de 150 ha était donc mis en fermage par le bureau de bienfaisance, ancêtre du C.C.A.S. actuel. Il était constitué de la plupart des terrains de l’actuelle zone industrielle, ce qui a fait la richesse récente de notre commune. Une maison de retraite a pris la suite de cet ancien asile et école, gérée jusqu’en septembre 2007 par les sœurs de Saint-Vincent de Paul.

En 1830, l'administration nomma un instituteur laïc en remplacement du prêtre, ce qui provoqua des divisions au sein de l'assemblée communale. Un second instituteur fut nommé d'office en 1879, il était logé dans la maison Mader sur la place. En 1907, à la satisfaction générale, un magnifique groupe scolaire est construit, avenue de Toulouse à l'entrée du village.

 

En 1839, le curé souhaite percer le mur du clocher afin de déplacer l’entrée de l’église. (Anciennement elle se situait sur le côté Est, là où se trouve maintenant un petit musée). Ces travaux ne seront réalisés finalement qu’en 1862. On bâti alors un porche situé à gauche du clocher avec une décoration de céramique de la maison Virebent.

 

Pour remplacer la salle de réunion des consuls, attenante à l’ancienne entrée de l’église, on va édifier en 1848, une mairie sur la place, où se trouve actuellement la police municipale.
Le presbytère, situé au 4 rue de l’église, servant précédemment d’école de garçons, a été transféré juste à côté dans une nouvelle maison construite en même temps que le nouveau porche de l’église grâce à la générosité de la chatelaine Mme Deffès, veuve Lignières.

L’activité industrielle démarre avec la présence d’une briqueterie mécanique. La première en 1862 en plein centre, au castelet, puis ayant fait faillite, une autre est édifiée au Coustou, gérée par 2 ingénieurs, MM Morel et Lussan en 1872. Elles remplacèrent l’ancienne tuilerie appartenant au château, sise au 37 de la rue des sports. En 1921, 70 ouvriers y étaient employés.

Dans les années 1880, un projet de canal d’irrigation (canal de Lalande) a vu le jour pour favoriser le maraichage, entre Toulouse et Bruguières. C’est ainsi qu’en 1900, a été creusé en limite des communes de Bruguières et Lespinasse un tronçon de 2 km de ce canal, de même qu’à Aucamville. Mais ce projet grandiose a périclité et a été définitivement abandonné en 1935.

 Une passerelle métallique est lancée sur l’Hers en 1904, elle raccourcissait entre autres, le trajet du facteur qui allait chercher le courrier à la gare de Saint-Jory .

L’éclairage public arrive en 1923. La première ligne d’autobus Toulouse-Bruguières est créée en 1927. Un réseau d’eau potable est prévu en 1947. Une nouvelle mairie est inaugurée en 1952. Elle abrite alors, nouveauté pour l’époque, des bains-douches.

Le début du XXème, siècle voit Bruguières avoisiner les 650 habitants pour ensuite dans les années 1960, passer à 1.500 âmes. Beaucoup sont agriculteurs, d'autres travaillent à la briqueterie Gélis ou bien à gare de triage de Saint-Jory. Les abattoirs de Fenouillet recrutaient une main d'œuvre plutôt féminine. Ces entreprises ferment hélas leurs portes dans les années 70.

Avec la création de l'autoroute A62 Toulouse-Bordeaux en 1980, et son péage situé sur la commune, l'évolution de notre urbanisation essentiellement pavillonnaire, fait croître notre population qui dépasse les 6000 habitants.